RIF 2010 : En toute amitié

RAID IN FRANCE... ça sonne dans ma tête depuis plusieurs semaines. C'est l'épreuve que je ne veux pas manquer, l'épreuve qu'il faut faire, l'épreuve sur laquelle je souhaiterai tant être performant. Depuis notre résultat moyen en 2009, dû en partie à ma tendinite et à de nombreuses approximations en orientation, j'ai tenté de trouver comment profiter de cette expérience : lucidité et calme dans les choix d'itinéraires, analyse fine du road-book et recul quant aux cartes au 1:50000eme.

Tout à commencé bien avant... mais le départ pour Serres qui accueille cette année la manche française de coupe du Monde s'est fait mercredi de Mende. David et Nico mes équipiers, Audrey et Agnès nos fabuleuses assistantes et Dan qui court avec les copains d'Agde sont du voyage. On récupère Ophélie notre féminine à Montélimar et on file vers les Hautes-Alpes. Sur le site de la Germanette.

Peu d'équipes sont déjà sur place et nous profitons donc de la fin d'aprem pour assurer les vérif admin et matos. Le jury très pointilleux ne néglige rien mais pour nous, après un poil de bricolage ça le fait. On se rend au camping et passons une agréable soirée décontractée avec les amis du MUC et d'Agde. Le jeudi sera tout aussi tranquille : les dernières vérif le matin, briefing en début d'aprem avec enfin la liste des sections qui laisse perplexe Nico :  "Comment peut-on mettre 6h pour faire 30km de VTT, ou bien 3h pour faire 6km de trek ?" tu vas voir Nico... En fin d'aprem la prépa finale des sacs laisse sentir une pointe de pression. Il n'y aura qu'un point d'assistance où l'on pourra récupérer de la nourriture. Ce dernier aura lieu tôt dans la course (vendredi en fin d'aprem) la seconde partie de course en autonomie complète sera donc longue (plus de 40h). Dernière soirée, ça branche toujours autant même si on commence à lire l'appréhension sur les visages. Nuit courte imposée par le départ à 7h00 et mouvementée pour moi, je me réveille à plusieurs reprises. Je me permet tout de même, avant de m'endormir de faire le point : la préparation physique a été bonne : assez mais pas trop, du qualitatif. Mes équipiers sont des guerriers, peu expérimentés sur ce type de format mais j'ai confiance en eux. Je sais comment aborder la course en terme d'orientation. Les doutes sont peu nombreux : je crains la forte chaleur annoncée pour ce premier jour de course et je dois absolument me mettre en confiance en orientation dès le départ. 

Le matin, les visages sont tendus sur la ligne de départ, je tâche de rester concentré sur ce que je dois faire. ça s'élance sur une petite CO pour étaler le peloton. On prend notre rythme et nous rentrons tranquillement en tête accompagné de Raidlight et de Raidlink's 1. Suit un trek assez court, la première carte au 1:50000eme... je m'applique, le premier poste n'est pas très complexe, je choisis ensuite d'assurer par la route plutôt que de couper dans un flan qui semble rocheux. Quelques équipes font ce choix plus rapide et passent devant. On arrive alors à la première transition. Peu d'écarts séparent les équipes qui s'élancent en VTT. Il y a encore beaucoup de tension. On prend notre rythme, l'équipe semble bien. Je choisis encore une option plus roulante à mes yeux que le petit sentier qui descend dans une combe. Nous nous retrouvons seuls, à la traversée d'un ruisseau je suis surpris de ne voir aucune trace, je consulte à nouveau la carte pour m'assurer d'être au bon endroit, aucun doute.

Au CP suivant les bénévoles nous annonce en tête : voilà pourquoi il n'y avait pas de trace. Le temps de faire pointer le passeport et plusieurs équipes arrivent. On enchaîne par le premier portage du raid (30min) qui nous mène sur les premières hauteurs. Nous sommes accompagnés par les copains de Raidlight (Seb, Tom, Denis et Sandrine). Une première coupe (qui en appelle d'autres) et nous redescendons sur le CP suivant toujours en tête. Un petit trek dans un fond de ruisseau pour se rendre au départ du canoë. Nous laissons partir Raidlight car Ophélie fait une crise de tachycardie (3min de repos et ça repart nous avait-elle annoncé).

L'arrivée au bateau donne des frissons dans le dos : toutes les assistances sont là et nous encouragent à notre arrivée. On s'élance pour 25km sur la Durance, le débit est faible et il faut à plusieurs reprises sortir pour tracter le bateau. C'est long d'autant plus que le soleil fait son apparition et commence à taper sérieusement. A proximité de l'arrivée on aperçoit Raidlight devant, ça nous remotive un peu pour finir. Mais le plus dur de la section nous attend à la sortie : il faut porter les canoë sur plusieurs centaines de mètres et malgré l'aide autorisée de nos assistantes, ce passage s'avère être un vrai calvaire. Il 14h30 et le soleil nous assomme. 

Nous repartons en VTT en choisissant de rouler calmement afin d'éviter de souffrir de la chaleur. Raidlight nous distance plusieurs fois, mais nous les reprenons sur des hésitations d'orientation. Il nous faut à plusieurs reprises s'arrêter pour faire le plein d'eau. J'hésite entre 2 options pour se rendre sur une balise et je choisie la sagesse en prenant celle conseillée dans le road-book : mauvaise pioche! nous perdons environ 10min et voyons ExpéNature et Raidlink's 2 passer devant alors que nous nous retrouvons une nouvelle fois avec Raidlight avec qui nous finissons la section pour atteindre le premier et unique point d'assistance du raid. Il est 18h45.

Nous décidons de faire 30min d'arrêt, afin de se changer, de se ravitailler et de refaire les sacs pour la seconde partie de course. Nous savons tous que le raid commence vraiment maintenant.   A mon sens nous avons bien gérer cette première étape : nous sommes dans le coup sans pour autant avoir taper dans nos réserves.

Nous repartons en VTT, une petite hésitation sur un poste où le cercle est mal centré et nous retrouvons Raidlight et Raidlink's 2 au CP suivant pour une vérif matos. Raidlight repart devant alors que nous renfourchons les montures avec les Ardéchois. 2eme portage du raid et pas des moindre : on tient à peine debout dans ce travers la nuit tombe et les jambes tirent. Je commence à souffrir mais nous nous encourageons mutuellement entre les huit coureurs. ça descend par une piste où nous dérangeons des dizaines de sangliers et rebelote : portage à nouveau monstrueux, le rythme est lent et nous faisons de nombreuses poses. Je propose à mes équipiers de prendre 2h de repos au CP suivant. Tout le monde est ok. Les Ardéchois hésitent à faire de même et choisirons également de faire un petit dodo. Lorsque nous arrivons au CP Raidlight dort aussi.

Il est 2h du matin lorsque nous repartons en trek droit dans la pente, une crête et il nous faut redescendre toujours hors chemin dans la vallée. Nous sommes toujours avec les Ardéchois et l'ambiance et bonne, le repos a fait du bien à tous. On oriente à 2. On rejoint le CP en 3eme position puisque ExpéNature est repassé devant durant notre repos. Nous avons 30min de retard sur eux et 1h sur Raidlight.

Le VTT suivant s'annonce sélectif. Une première longue montée sur piste qui se termine sur un sentier en crête et le levé du jour nous permet d'apercevoir la suite du menu avec le massif du Dévoluy. On redescend dans la vallée, puis, à nouveau, piste et un portage interminable pour rejoindre le chemin qui nous mène au départ de la section montagne. Nous sommes toujours huit, l'entente est parfaite et même si les jambes souffrent nous avons le moral.

A la transition suivante, nos assistances sont là uniquement pour nous fournir de l'eau car il y a visiblement peu de point d'eau durant le trek montagne qui est annoncé de 10h mini. L'équipe ExpéNature est encore sur le CP lorsque nous arrivons, ils ont l'air rincé. Raidlight n'est pas très loin devant : environ 30min. Malgré une progression peu rapide nous n'avons pas perdu de temps en orientation. Tout reste possible. Derrière la casse commence à se faire sentir et les écarts grandissent.

Contrôle du matériel montagne ok nous reprenons la route seuls car il manque une poignée jumar dans les sacs des Ardéchois qui doivent attendre que Nelly, leur assistante, leur ramène celle-ci et qui doivent subir une pénalité de 30min. Nous marchons bon train, Ophé souffre du sommeil. Nous apercevons ExpéNature et revenons sur eux à l'approche des cordes. Nous les doublons même dans le pierrier qui mène au premier col. Dans le pierrier suivant nous apercevons Raidlight dans la partie haute sur les cordes. A la sortie de celles-ci nous perdons un peu de temps par ma faute : Ophélie a besoin d'un coup de main et seul Dav l'assiste alors que je suis vraiment bien je ne prends pas le temps de les attendre pour prendre le relais de Dav. On traverse le plateau de Bure sous 80km/h de vent et nous amorçons la descente dans une gigantesque combe qui n'en finit jamais. Les chaussures de trek sont usinées par la pierre. On arrive enfin au CP suivant. Je râle car ce dernier est mal placé et nous le cherchons plusieurs minutes alors que la course est très serrées.

Nous repartons en VTT quelques minutes après ExpéNature. Dav souffre du c.. je m'occupe donc d'aider Ofé dans le portage suivant. Une longue descente nous mène au départ de la spéléo. La nuit tombe, il est 21h. Petit coup de stress du Nico sur les cordes anodines de la grotte et on ressort pour prendre 2 nouvelles heures de repos. Raidlight dort également sur ce CP et les Ardéchois en font de même une demie heure plus tard.

Nous repartons au milieu de la nuit en VTT. D'entrée il nous faut traverser une rivière pour rejoindre un sentier peu visible nous le cherchons durant 30min en faisant des aller/retour sur un chemin avant de s'apercevoir que nous étions en faite sur le dit sentier! j'en prends un coup au moral, c'est la première vraie erreur d'orientation du raid. S'en suit une longue montée où Nico tracte Ofé. La carte est complètement fausse. Nous arrivons enfin au col et pour redescendre il en est de même, nous empruntons une piste qui ne ressemble pas à ce que je peux lire sur la carte, j'ai froid notamment aux pieds. Lorsqu'on rejoint la route dans la vallée je ne suis pas sur que l'on arrive au bon village, je m'arrête. Il me faut faire quelque chose pour mes pieds qui sont gelés. Dav me prête des chaussettes sèches que je mets avec des sacs en plastique : je revis! le village est le bon, on suit le road-book qui une nouvelle fois nous fait perdre 15min en empruntant un GR sinueux qui remonte à flan de montagne pour atteindre le CP suivant. Je peste d'autant plus qu'il n'y a personne à ce CP que nous cherchons plusieurs minutes et finalement c'est Guillaume le copain d'Ofé qui ayant vu passer des lumières et qui nous attendait pour prendre des photos nous dit que les bénévoles dorment dans une voiture. encore 10min dans le vent. On aperçoit des frontales derrière nous : et quelques minutes plus tard on se retrouve à nouveau avec les Ardéchois. Je suis à la fois deçu, d'avoir perdu tant de temps, et heureux qu'il s'agisse d'eux et non d'une autre équipe. ça nous relance et je reprend le moral. La montée suivante est à nouveau difficile tant physiquement qu'en orientation : le chemin que nous envisagions de prendre n'existe plus, nous nous rabattons sur un autre sentier qui, pour le coup, passe par un col 100m de deniv+ plus haut. Long portage et nous rejoignons la transition suivante.

Le jeune nous annonce que nos assistantes nous encouragent et nous font plein de bisous, ça nous met du baume au coeur pour repartir en trek. La première partie est basique sur un sentier mais la fin s'annonce plus délicate avec le passage d'une crête et la redescente tout hors chemin. Adri envisage de contourner par l'Ouest je suggère de plutôt rattraper un col à l'Est pour redescendre dans le travers. Nous faisons ce choix mais nous craignons que la végétation soit délicate pour la redescente. Nous tentons de trouver le meilleur passage possible et rejoignons la transition suivante plutôt satisfaits.

Il est 10h du matin et les premières chaleurs se font sentir. Reste une section VTT et un petit trek. Il sera difficile de revenir sur les 2 équipes de devant. Une nouvelle montée sur piste nous fait prendre de la hauteur, l'ambiance et bonne. Nous finissons l'ascension par un petit portage, mais la difficulté arrive : une crête impraticable en vélo et longue de 4km nous attend. La lassitude commence à se faire sentir. Avec Adri nous tentons de remotiver les troupes pour terminer cette galère. Au bout, trop heureux d'en avoir quasi terminé, nous nous élançons dans une sympathique descente et manquons le sentier à droite : recalage difficile plus bas pour rattraper le coup et rejoindre la piste qui nous mène à la dernière transition.

Nous effectuons le dernier petit trek tranquillement. Les discussions vont bon train. A l'approche de l'arrivée les équipes ayant été neutralisée durant la course nous attendent afin de nous laisser arrivée devant et quelques frissons nous traversent le dos lorsqu'on aperçoit les copains du MUC et d'Agde. Nous filons vers l'arrivée, le sourire aux lèvres, on n'a plus mal nul part dans ces cas-là.

Nous sommes fiers, je suis fier et heureux, de finir l'épreuve à cette position et surtout de partager celle-ci avec les copains de l'équipe (Ofé, Dav, Nico) et de Raidlink's (Marie, Adri, Alex, David). Nous avons partagé de superbes émotions ensembles. Et tout ça de façon complètement naturelle. Si certains nous imaginaient arriver au sprint, ils sont loin du compte. Si ça nous a effleuré l'esprit, c'était uniquement pour en plaisanter. A l'approche de la ligne, quelle saveur, quelles sensations. Main dans la main nous avons franchi la ligne d'arrivée à 12 accompagnés de nos assistantes. Si certains ont trouvé ça surprenant, bizarre, pour nous 12, ce fut naturel.  Alors merci...

...Merci à Pascal et à toute son équipe après qui on peste dans les galères, après qui on crie au CP lorsqu'on trouve une petite coquille qui nous donne l'impression que ça va changer le cours de la course. Mais en fait c'est vous qui changez le cours des choses et nous permettez de vivre ces moments intenses.

...Merci à mes équipiers et copains Ardéchois avec qui je suis prêt à partager de nouvelles aventures de ce type si elles doivent me procurer autant de plaisir.

...Merci à tous les amis raideurs présents sur la course et notamment Dan, les copains d'Agde et du MUC avec qui nous avons tant rigolé au cours du week-end.

...Merci à nos 2 fabuleuses assistantes qui ont, semble-t-il, tout autant animé la course que les coureurs et qui ont été merveilleuses de part leurs attentions et leur bonne humeur. 

... et bravo, à Sandrine, Denis, Seb et Tom pour cette superbe victoire! Vous l'avez méritée et construite pas uniquement sur 3 jours mais bel et bien sur toute une saison. Je mentirai si je disais que je suis autant heureux de vous voir sur la première marche qui si nous y étions mais ça fait énormément plaisir de voir que les rêves ne sont pas inaccessibles : il faut juste se donner les moyens de les réaliser. Alors bon vent pour l’Espagne...